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– Madame la Présidente, seule la France peut décider de modifier son propre Code du travail. Voici une affirmation qui ne sera peut-être plus une vérité demain. En atteste ce rapport sur les travailleurs des plateformes.
Les conditions de travail épouvantables et la précarité des livreurs à vélo qui parcourent les rues de nos villes sont d’autant plus de signes qui montrent que la mondialisation sauvage produit une véritable jungle économique que nous devons combattre. Voici que ni une ni deux, l’Union européenne, touchée par le syndrome du sauveur, accourt à leur chevet. En vain.
En effet, comme chaque fois, le bureaucratisme bruxellois, dont la lenteur d’action n’est plus à démontrer, est là encore dépassé: l’Espagne, la France, mais surtout la Suisse et le Royaume-Uni, en dehors de l’Union, s’activent déjà pour remédier aux problèmes de faux indépendants. Nos nations le font en promulguant des décrets ou en laissant les tribunaux agir souverainement. La requalification des contrats est en cours et c’est une bonne chose. Par conséquent, ne laissons pas l’Union européenne profiter du malheur des gens pour s’immiscer dans des matières dont elle n’a pas la compétence. La France agit et doit agir davantage pour salarier ceux qui doivent l’être.
Il faut aussi en finir avec l’utilisation scandaleuse d’illégaux dans l’économie des plateformes. Nous refusons l’immigration qui provoque le dumping social. Nos emplois doivent être réservés aux nôtres avant tout. Si la mondialisation rime avec précarisation, faisons de la nation le levier qui permettra de lutter efficacement contre ces pratiques indignes.
À l’ère du progrès technique, les plateformes dont l’ère numérique a permis l’avènement déstructurent les institutions, déconstruisent les conventions et désintègrent les avancées sociales. Sous couvert de liberté et d’auto-entrepreneuriat, leurs promoteurs osent vanter un nouvel esclavagisme qui ne dit pas son nom.
L’État nation seul peut mettre au pas ces grands féodaux. L’État nation seul permettra à un peuple de décider comment l’économie et le progrès technologique doivent servir nos forces vives et non le contraire. L’État nation seul permettra l’exercice réel de la démocratie et de la souveraineté populaire face aux multinationales qui entendent nous imposer leurs choix mortifères. L’État nation seul permettra de se tourner vers l’avenir et non de revenir à des modèles d’exploitation d’un autre temps. L’État nation, c’est la liberté et c’est cette liberté pour laquelle nous nous battons et nous devons nous battre. C’est un combat que l’Union européenne a vraisemblablement abandonné. C’est peut-être même un combat que l’Union européenne a tout simplement refusé de livrer.
– Madame la Présidente, Monsieur le Commissaire, depuis plus d’une dizaine d’années, nous voyons se développer une forme de travail nouvelle offrant de nombreuses opportunités économiques pour nos entreprises, nos entrepreneurs et nos emplois. Avec la pandémie que nous venons de traverser, ces emplois liés au numérique ont pris une toute autre mesure. Les travailleurs des plateformes ont ainsi permis de sauver certains restaurateurs en leur permettant de continuer à fonctionner un minimum pendant ces mois de crise sanitaire. Ces hommes et ces femmes aux profils parfois très différents se trouvent parfois dans des conditions de travail difficiles et c’est notre rôle de les protéger, de garantir qu’ils aient accès au statut juridique adéquat et aux droits qui en découlent, tout comme il nous revient d’assurer une concurrence loyale à nos entrepreneurs vis-à-vis des plateformes.
Le rapport du Parlement exprime ici la nécessité de protéger les travailleurs des plateformes, en considérant en particulier que ceux-ci sont par défaut salariés. Concrètement, en cas de conflit, ce sera donc à la plateforme de prouver que le travailleur est indépendant si elle estime que c’est le cas. Ce mécanisme viendrait donc répondre aux problèmes de qualification existants, tout en laissant une flexibilité pour les plateformes faisant travailler de véritables indépendants. Je me réjouis donc de l’adoption de ce rapport qui protège les travailleurs et laisse la possibilité d’opportunités économiques.
Et la définition du mot présomption est sans ambiguïté. Du latin
Si nous vous demandons d’agir, Monsieur le Commissaire, ce n’est donc pas pour forcer les indépendants à se salarier. Si nous vous pressons, c’est d’abord pour remédier à l’extrême précarité des chauffeurs VTC et des livreurs de repas en deux-roues. Mais c’est aussi, et surtout, pour l’ensemble du monde du travail: si aujourd’hui, nous permettons à Uber d’avoir des travailleurs sous ses ordres sans assumer sa responsabilité d’employeur, demain, c’est tous les salariés dont le statut sera menacé de remplacement par un faux indépendant.
– Madame la Présidente, Monsieur le Commissaire, tout d’abord, je remercie chaleureusement Mme la rapporteure, Sylvie Brunet, pour le travail qu’elle a accompli. Le Parlement européen, avec elle, avec vous tous, chers collègues, envoie un message clair: les travailleurs des plateformes ne doivent pas être des laissés-pour-compte du droit du travail. Qu’ils aient un statut d’indépendant ou de salarié, il est temps d’être à la hauteur du modèle social européen et de garantir à tous ces travailleurs des conditions de travail décentes, une rémunération juste et équitable, ainsi que l’accès à la protection sociale.
Il y a déjà près de trois ans, les États membres ont adopté au Conseil une recommandation pour garantir à tous les travailleurs, salariés ou non, l’accès à la protection sociale. Malheureusement, malgré les engagements pris, cette recommandation est restée lettre morte. Que constatons-nous? La précarité de nombreux travailleurs des plateformes. Vous l’avez dit, Monsieur le Commissaire: à nous d’agir, de changer cet état de fait. Mais ne jetons pas l’opprobre sur les plateformes qui peuvent permettre l’entrée sur le marché du travail d’Européens qui pouvaient en être éloignés. Il nous revient, à nous législateurs, d’encadrer cette nouvelle forme de travail pour que travailler pour Uber ou Deliveroo soit synonyme d’accès aux droits sociaux, à la protection sociale et à une rémunération décente.
Cette directive à venir devra en effet non seulement offrir un ensemble de droits, comme le congé de maladie, mais également penser le travail de plateforme comme un possible tremplin vers d’autres emplois. Cela signifie que les travailleurs doivent avoir un compte formation qui leur permettra d’acquérir de nouvelles compétences et d’évoluer vers de nouveaux emplois.
Nous avons dit et répété que la transition vers un monde numérique ne doit laisser personne sur le bord du chemin. À nous de le prouver. Conditions de travail décentes, droit du travail, droits syndicaux, accès à la protection sociale, accès à la formation: autant de droits que nous devons garantir à tous, quel que soit le lien contractuel qui unit ces femmes et ces hommes à leur employeur.
Soyons à la hauteur de nos promesses et démontrons à nos concitoyens que nous nous battons pour notre modèle social, pour un modèle social qui ne soit pas réservé à une partie seulement des travailleurs européens. Tous doivent être protégés. Il s’agit d’un impératif social. Par ailleurs, qu’aurions-nous fait sans ces travailleurs de première ligne lors de la crise du COVID?
Alors, Monsieur le Commissaire, je vous sais de notre côté, faisons honneur à nos valeurs et à notre engagement pour le progrès social. La balle est maintenant dans votre camp. Le rapport de Sylvie Brunet est une excellente base, utilisons-le.
Le sommet social de Porto a été l’occasion d’identifier les priorités immédiates de la mise en œuvre du socle européen des droits sociaux, au titre desquels figurent ceux des travailleurs des plateformes. Je souhaite également mentionner la seconde phase des consultations des partenaires sociaux, qui se terminera mercredi. Je suis sûre qu’elle sera riche d’enseignements. Dans ce contexte, je me réjouis que la majorité des groupes politiques se soient pour l’instant retrouvés sur la nécessité d’une action européenne et sur les besoins spécifiques des travailleurs des plateformes.
Je vais prendre quelques instants pour vous préciser les priorités de mon rapport. Premier point: un accès renforcé à la protection sociale. Je souhaite que, quel que soit leur statut, les travailleurs des plateformes bénéficient d’une protection sociale minimale. Cela veut dire notamment que tous les travailleurs des plateformes devraient avoir le droit de recevoir une indemnisation en cas d’accident du travail ou de maladie professionnelle et bénéficier d’une protection sociale comprenant une couverture d’assurance maladie et invalidité. Nous appelons également à étendre les droits à la protection sociale aux travailleurs des plateformes indépendantes, y compris aux personnes qui passent d’un statut à un autre ou qui ont les deux statuts, afin de garantir la portabilité des droits et des prestations. Nous avons déjà un instrument européen allant dans ce sens: la recommandation du Conseil sur l’accès des travailleurs salariés et non salariés à la protection sociale. Je souhaite souligner son importance pour les États membres, lesquels doivent la mettre en place sans tarder.
Deuxième point: des conditions de travail améliorées, justes et transparentes. Les plateformes numériques de travail devraient garantir la communication des informations essentielles concernant les conditions de travail et les règles de coopération, la méthode de calcul du prix et l’attribution des tâches. Elles devraient également assurer la transparence en cas de modification des règles et avoir recours à des consultations. Il est également important que les travailleurs puissent avoir un droit de recours en cas de suspension de compte. Travailler pour plusieurs plateformes doit être aussi un droit pour eux, de même qu’avoir accès à leurs données.
Troisième élément majeur: la représentation collective. La négociation collective est un élément clé pour l’amélioration des conditions de travail de ces travailleurs. Les travailleurs des plateformes, même indépendants, doivent pouvoir s’organiser et négocier collectivement. J’appelle la Commission européenne à préciser que les conventions collectives ne relèvent pas de l’interdiction du droit de la concurrence, afin de garantir que ces travailleurs des plateformes puissent se syndiquer, être représentés et participer aux négociations collectives.
Quatrième élément: plus de sécurité juridique pour les travailleurs des plateformes et les plateformes. Cela a été un grand point de débat pour nous. Notre objectif devrait être d’aller vers plus de sécurité juridique pour les travailleurs des plateformes. Cela sera également favorable aux plateformes qui pourront se développer avec plus de clarté, mais aussi à l’économie dite traditionnelle, en garantissant des conditions de concurrence équitables. Une présomption réfragable d’une relation de travail encadrée devrait s’appliquer aux travailleurs qui contestent leur statut lors d’une procédure. Elle ne doit toutefois pas conduire à considérer automatiquement tous les travailleurs des plateformes comme des travailleurs salariés. Les travailleurs véritablement indépendants le resteront. Ce qui est également important est que nous proposons un renversement de la charge de la preuve afin que lorsqu’un travailleur de plateforme conteste son statut professionnel, ce soit à la partie dont il est allégué qu’elle est l’employeur de prouver qu’il n’existe pas de relation de travail. Enfin, soyons clairs, nous ne souhaitons pas de troisième statut pour les travailleurs des plateformes.
Cinquième élément: un lieu de travail sain et sûr. Les travailleurs des plateformes, sur site, doivent être équipés d’équipements personnels de protection adéquats et être couverts par une assurance contre les accidents lorsqu’ils travaillent dans les secteurs du transport et de la livraison. Ils doivent également pouvoir se déconnecter de la plateforme sans subir de conséquences négatives. Nous souhaitons protéger les travailleurs des plateformes et les clients contre les risques de violence et de harcèlement en mettant en place des mécanismes de signalement efficaces sur les plateformes.
Sixième élément: le développement des compétences – point très important aussi. Une formation devrait être dispensée aux travailleurs par la plateforme de travail numérique elle-même sur l’utilisation de son site ou de son application, les tâches à effectuer et la santé et la sécurité au travail. Les travailleurs des plateformes, en particulier les moins qualifiés, devraient accéder à des formations permettant d’acquérir des compétences et d’améliorer leur employabilité.
Enfin, septième élément, et non des moindres: une gestion algorithmique transparente, non discriminatoire et éthique. La gestion algorithmique a révolutionné le monde du travail. Il est clair que nous souhaitons assurer l’utilisation d’algorithmes qui soient transparents, non discriminatoires, éthiques et fiables. Pour réaliser cet objectif, il faut s’assurer que les informations principales sur les conditions de travail soient expliquées de manière intelligible. Il s’agit de paramètres de l’algorithme qui influent sur la répartition des tâches, les notations et les interactions, la procédure de désactivation et la tarification. De plus, cela paraît peut-être une évidence, mais la gestion algorithmique doit être contrôlée par des humains pour que les travailleurs puissent contester une décision via des procédures efficaces.
En conclusion, chers collègues, clarifier les droits, augmenter les protections là où elles manquent, trouver le point d’équilibre entre les avantages et les inconvénients du travail de plateforme sont, je crois, autant d’objectifs qui ont été atteints avec ce rapport. Je salue à nouveau l’annonce de l’initiative législative de la Commission européenne pour améliorer les conditions de travail des travailleurs des plateformes, prévue pour le 8 décembre. Cela représentera une brique supplémentaire pour la construction de l’Europe sociale. Nous pouvons dire que le Parlement européen y contribue de manière volontaire, avec ce rapport, et nous espérons que la Commission en prendra note lorsqu’elle finalisera sa proposition.
Monsieur le Commissaire, agissons ensemble pour adapter le cadre européen aux nouvelles réalités du monde du travail en nous assurant que les valeurs européennes soient ancrées dans l’économie numérique et afin que les possibilités offertes par les nouvelles formes de travail restent durables et équitables. Oui au «digital», mais pas au détriment des conditions de travail des travailleurs des plateformes en Europe.
– Madame la Présidente, Monsieur le Commissaire, Madame la rapporteure, chers collègues, le 6 mai 2021, Chahi, livreur, livre un repas près de Rouen, à vélo, sous la pluie. Il travaille pour Uber Eats. Chahi, sous pression, est renversé.
Ce père de famille aurait-il perdu la vie si la plateforme avait assumé ses responsabilités d’employeur? Si la plateforme avait assuré la sécurité du vélo et de son équipement? Si elle lui avait permis de travailler non pas au rabais, à la course, mais avec une garantie de salaire?
Nous, législateurs, avons une responsabilité envers Chahi et les 24 millions de personnes qui travaillent pour des plateformes numériques de ce type: celle de rendre effectif le droit du travail, des droits acquis de haute lutte, pour elles et pour eux. Je me félicite que ce Parlement s’apprête à appeler la Commission européenne à introduire une présomption de relation de travail et à renverser la charge de la preuve devant le juge.
Quand on voit que les travailleurs sont aux ordres d’algorithmes qui les mettent en compétition avec d’autres travailleurs, quand on voit qu’ils sont soumis à des pressions de temps de plus en plus fortes et à des prix dictés toujours vers le bas, nous devons imposer aux plateformes de prendre leurs responsabilités. Ce n’est pas aux travailleurs de prouver le salariat, c’est à la plateforme de s’en défendre. Oui au numérique pour le progrès social. Non à la gestion du travail par des algorithmes sans surveillance humaine et dans l’exploitation des plus vulnérables. Oui, au travail réellement indépendant, non aux salariés déguisés et à la «disproportionnalisation» des employeurs.
Derrière ce rapport, de nombreuses personnes espèrent que l’Europe va enfin freiner la libéralisation irresponsable de leur travail. Pour eux et pour les victimes comme Chahi, soyons à la hauteur.
– Madame la Présidente, Monsieur le Commissaire, cher Nicolas Schmit, je tiens tout d’abord à m’associer aux félicitations qui ont été faites et à saluer l’excellent travail de notre rapporteure et amie Sylvie Brunet. Le texte que nous nous apprêtons à voter est important pour des millions de travailleurs des plateformes, souvent des jeunes. Il propose une voie à suivre pour que la flexibilité de travail inhérente aux plateformes rime aussi avec sécurité. Il encourage à accompagner les mutations au travail sans sacrifier les avancées sociales.
Parmi les mesures proposées, je tiens à saluer l’accent mis sur la santé au travail. Les travailleurs des plateformes peuvent être exposés à des risques accrus. Il ne s’agit pas seulement d’accidents, mais aussi de leur état de santé. Alors que le monde entier était confiné du fait de la pandémie, ils ont pour la plupart continué à travailler, exposés en première ligne. La santé mentale peut être affectée par l’imprévisibilité et l’intensité de leurs conditions de travail, mais aussi par la compétition accrue entre eux.
Les règles élémentaires de santé et de sécurité au travail, qui sont un exemple concret de l’Europe sociale que nous voulons construire, doivent donc s’appliquer à tous les travailleurs européens. Une protection sociale adéquate garantissant une assurance en cas d’accident ainsi qu’une couverture maladie et invalidité doit être garantie. Certaines plateformes le font déjà et une généralisation est possible.
Il nous faut maintenant, chère Sylvie, un cadre législatif, car il ne peut y avoir de travailleurs de seconde catégorie, surtout lorsqu’il s’agit de santé.